Les députés (dont le député-maire de Pontoise Philippe Houillon) avaient déjà approuvé la semaine dernière ce texte qui assouplit la législation dans les "zones d’influence touristique" et créée des "périmètres d’usage de consommation exceptionnelle" dans les agglomérations de plus d’un million d’habitants.
Malgré l’hypocrisie d’un article premier réaffirmant le principe du repos dominical, l’importance des zones de dérogation ainsi ouvertes (plusieurs millions d’habitants concernés) ne doit pas nous tromper : la droite vient de porter un coup décisif au repos du dimanche.
Des emplois créés, mais combien de supprimés ?
But affirmé : permettre la croissance et créer des emplois. Or cela ne tient pas la route : ce ne sont pas les plages d’ouverture des magasins qui déterminent les consommateurs à acheter ou non, mais le pouvoir d’achat, lequel n’est pas extensible à volonté.
Comme l’ont souligné les opposants à ce texte il y aura tout au plus un transfert d’activité : "au lieu de consommer la semaine ou le samedi, on consommera le dimanche. Ni plus ni moins... mais pas au même endroit" (cf. Le travail dominical va être généralisé, Libération, page Rebonds, mardi 21 juillet 2009).
Premières victimes de ces nouvelles dispositions : les salariés qui n’auront pas vraiment le choix ( dans les zones touristiques le volontariat n’est pas obligatoire, dans les autres zones, il risque d’être formel)...
Que vont devenir les petits commerces ?
Deuxièmes victimes : les commerces de proximité, les marchés de centre ville et de quartiers.
Imaginons Le centre Leclerq d’Osny et celui des "3 fontaines" ouverts le dimanche (après le vote de cette loi, c’est bien ce qui nous pend au nez) : que deviennent les commerces du centre de Pontoise, et les marchés de la ville, à terme ? Aucun "manager de ville", quel que soit son talent, ne suffira à endiguer la vague qui emportera les commerces de proximité, à moyenne échéance, quand les nouvelles habitudes de consommation seront prises.
C’était bien la peine, Monsieur Houillon, de proclamer votre hostilité à l’extension des "3 fontaines", pour, à peine un an plus tard, avec vos collégues de l’UMP, inventer une autre extension, aux effets identiques, voire pires : celle des plages d’ouverture des hyper marchés !
Vers la société anonyme ?
Et puis, il y a un autre enjeu : le repos dominical, ce n’était pas le néant, une sorte de "jour vide", c’était aussi le jour où les Français, dans leur immense majorité, avaient en commun la possibilité de se rencontrer, de faire des choses, en dehors des nécessités professionnelles et des impératifs de la consommation.
Désormais, des millions d’entre nous ne seront plus disponibles le dimanche. Les jours de liberté ne se recouperont plus. Diminution des contacts possibles. Il faudrait remettre du lien... Voici qu’on sépare, qu’on fragmente, qu’on divise un peu plus, en diminuant les occasions de se rencontrer pour autre chose que le travail : pour parler, agir, choisir ses interlocuteurs, s’aimer, croire, lire et parfois lutter.
En brisant ce moment commun, en faisant du dimanche un jour comme les autres, n’est-ce pas une nouvelle société qui s’annonce ? L’avons-nous vraiment décidée, cette société anonyme et sans considération pour la qualité des rapports entre les êtres ?